Si les ruptures de parcours de soins sont associées à la non-continuité des soins, comme par exemple l’absence ou l’arrêt d’une prise en charge, et les hospitalisations évitables ou inutiles, il n’existe pas aujourd'hui de définition établie de la « rupture de parcours de santé ».
La définition la plus unanime serait la suivante : "Une situation de rupture se caractérise par une insuffisance ou un arrêt des aides, de l’accompagnement et/ou des soins, entrainant un préjudice d’intensité variable pour la personne aidée, pouvant aller jusqu’à compromettre son projet de vie." (Sources : BO du 16/08/2023, p.238)
Dès lors, le DAC 61 a construit son observatoire avec pour objectif de recencer et donner à voir les ruptures dans le parcours de soins, mais également dans les parcours sociaux, médico-sociaux et préventifs.
Quand une personne est confrontée à une problématique médicale ou sociale, elle s'oriente ou est orientée vers le professionnel compétent qui apporte une solution. Autrement dit : 1 problème = 1 solution.
Schématiquement :
Quand une personne est confrontée à une problématique médicale ou sociale :
- elle peine à s'orienter ou à être orientée vers le professionnel compétent ;
- elle s'oriente ou est orientée vers le professionnel compétent qui peine à trouver une solution, qui se met en place après un délai raisonnable.
Schématiquement :
Quand une personne est confrontée à une problématique médicale ou sociale :
- elle n'arrive pas à s'orienter ou être orientée vers le professionnel compétent ;
- elle s'oriente ou est orientée vers le professionnel compétent qui ne trouve pas de solution.
Schématiquement :
Quand une personne est confrontée à une problématique médicale ou sociale, son parcours l'amène à rencontrer plusieurs sources de rupture potentielles.
Il s'agira d'orienter au mieux la personne parmi les solutions et alternatives possibles en fonction des ressources disponibles sur un territoire donné.
Schématiquement :
Lorsque le système, une organisation, un service ou encore un professionnel dysfonctionne, l'environnement autour de la rupture va, par compassion et conscience professionnelle, régulièrement compenser l'absence de ressouces compétentes.
Dès lors, avec le temps, des dysfonctionnements répétés et compensés vont devenir des fonctionnements tacites, sources de mauvaises habitudes et d'épuisement des professionnels.
Les remontées centralisées des ruptures de parcours de santé permettront d'accompagner les professionnels, établissements et autorités de régulation dans la (re)structuration du système de santé, de l'échelle locale à nationale.
Cette classification est une proposition originale du DAC de l'Orne et n'est pas issue d'une réflexion nationale.
L'attractivité des métiers et l'attractivité du territoire sont des thématiques de travail prioritaires, car le manque de ressources humaines provoque des raréfactions voire des disparitions de services, sources principales des ruptures de parcours et de l'épuisement des professionnels.
Exemple de rupture : Suite au manque de personnel dans un Service de Soins Infirmiers À Domicile (SSIAD), ce dispositif ne peut pas prendre en charge Mme D. à son domicile, qui est contrainte de rester hospitalisée.
Les "bons" réflexes : une communication originale et omniprésente !
Du contenu innovant et attrayant sur les moteurs de recherche d'emploi classiques (Pôle Emploi, Indeed...), spécialisés (Annonces médicales...), ou encore locales (Orne Emploi, Emploi Normandie).
Sans oublier l'incontournable réseau social des professionnels : LinkedIn !
Les points d'amélioration : L'amélioration de la Qualité de Vie au Travail (QVT) et des rémunérations restent la priorité pour renouveler l'attractivité des métiers de la santé et de l'autonomie.
Définition : La mobilité concerne tout à la fois celle de l'usager et celle du professionnel. Dans les zones rurales, les déplacements liées à l'accompagnement médical ou social devient vite contraignant pour l'un comme pour l'autre.
Exemple de rupture : M. G., peu mobile, ne peut plus conduire sur de longs trajets. Isolé en zone hyper-rurale et avec de faibles revenus, il doit se rendre à Alençon pour des rendez-vous médicaux de spécialistes, inaccessibles à proximité. Le Transport À la Demande ne peut le véhiculer car les lieux de consultation sont en dehors du territoire défini.
Les "bons" réflexes : se saisir de toutes les ressources disponibles !
Bien que l'Orne soit un département rural, voire hyper-rural pour certains territoires, il existe de nombreuses offres de services de mobilité, tant en transports collectifs qu'individuels (cf. Guide des Ressources ou Carte mentale des parcours de santé).
Il peut être judicieux de coordonner plusieurs offres de transport si la personne a les capacités nécessaires : TAD Domicile -> Car -> TAD RDV médical, et inversement.
Les points d'amélioration : Les principales contraintes de ces différents dispositifs existants sont principalement : les coûts ; les capacités d'orientation et/ou capacités d'anticipation/programmation ; les premiers et derniers kilomètres. Le développement des dispositifs mobiles, allant vers les usagers, et des services de proximité est à continuer, voire à accentuer.
Définition : Par contrainte de missions, de cadre juridique, de sécurité numérique ou plus simplement de temps, certains services et/ou professionnels ne peuvent travailler de concert, ce qui rend complexe l'accompagnement globale de la personne, quand bien même le partage d'informations au sein de l'équipe de soin élargie (soins & social) facilite cette pratique devenue indispensable.
Exemple de rupture : Mme L. est âgée et isolée. Plusieurs symptômes se manifestent, mais il est difficile de déterminer leur cause : sont-ils liés à une maladie neuro-évolutive, à un déséquilibre de sa santé mentale, ou aux deux cumulés ? Les professionnels de gériatrie et professionnels de psychiatrie ne collaborent pas, ce qui ne permet pas de poser un diagnostic fiable et donc une prise en soins adaptée.
Les "bons" réflexes : accepter de perdre du temps pour en gagner !
Bien que sur le court terme la charge de travail peut vite s'accumuler, il paraît essentiel aujourd'hui de s'acculturer afin de développer le "travailler ensemble", ce afin de soulager les professionnels, expertiser les accompagnements et fluidifier les parcours de santé des personnes.
Des outils de coordination fiables, sécurisés, décloisonnés et abordables existent ! (présentation d'un outil de coordination prochainement)
Les points d'amélioration : La rigueur organisationnelle de certaines institutions, publiques comme privées, freine la généralisation de la pratique interprofessionnelle et intersectorielle. Il devient urgent d'en faire bouger les lignes afin de mettre les professionnels de santé non plus en concurrence, mais bien en coopération.
Définition : La zone blanche se définit par l'absence de professionnels et/ou de services sur un territoire donné, mais pas seulement. Il est aussi possible de parler de zone blanche quand il y a absence de compétences, comme c'est le cas quand des services sectorisés ne fonctionnent pas de la même manière selon les territoires.
Exemple de rupture : Mme W. doit renouveler son titre de séjour sur le territoire français afin de conserver ses droits, en particulier d'accès aux soins au vu de sa santé qui se dégrade. Sa mobilité ne lui permet pas de se déplacer en dehors du domicile, elle ne peut donc pas se rendre à la préfecture qui sollicite une prise d'empreintes. Aucun service sur le territoire n'est habilité à prendre les empreintes de Mme W., qui ne peut renouveler son titre de séjour, donc sa carte vitale.
Les "bons" réflexes : proposer un service flexible et adapté aux territoires ruraux
Les contraintes budgétaires et/ou humaines freinent la couverture de tous les territoires par certains services. Il convient d'assouplir les critères d'inclusion afin de prendre en charge des personnes qui ne sont pas du territoire ou d'élargir le secteur géographique d'activité (quand les ressources, la charge de travail et les autorités de régulation le permettent).
Les points d'amélioration : Rendre lisible de manière objective et quantitative l'absence de compétences, professionnels ou services sur un territoire donné afin de négocier avec les autorités de régulation le financement nécessaire à la création de postes ou services sur lesdits territoires.
Définition : Bien que tout professionnel peut avoir droit à l'erreur, quand bien même cela peut occasionner un préjudice pour la personne accompagnée, il est nécessaire de mettre en lumière les dysfonctionnements, surtout récurrents, afin d'accompagner le professionnel vers une évolution de ses pratiques (analyse de pratique, groupe de réflexion éthique, formation...).
Exemple de rupture : M. J. est âgé et commence à développer des troubles de la mémoire. Son médecin traitant refuse de l'orienter vers le gériatre le plus proche, le présentant à son patient comme totalement incompétent. Or, il n' y a aucune autre disponibilité d’examens gériatriques dans un rayon de 50 km.
Les "bons" réflexes : accepter l'erreur ou les critères d'inclusion de l'autre
Être tolérant dans les erreurs ponctuelles et explicables de professionnels et dans les refus de prises en charge des services contraints par leurs cahiers des charges. Cela occasionne trop vite des tensions, des ruptures relationnelles entre professionnels, non propices aux parcours de santé.
Les points d'amélioration : Développement l'interconnaissance et le travailler ensemble afin de généraliser les pratiques interprofessionnelles et intersectorielles. Il devient urgent d'en faire bouger les lignes afin de mettre les professionnels de santé non plus en concurrence, mais bien en coopération.
Définition : Un service peut dysfonctionner pour différentes raisons, les principales étant la vacance de postes et l'absentéisme. Il est indispensable de repérer ces dysfonctionnements afin d'accompagner ces structures en souffrance qui souvent portent le monopole de certaines missions sur les territoires.
Exemple de rupture : Avec l'appui d'un professionnel, M. N. a réalisé une demande d'Allocation Personnalisée d'Autonomie (APA) auprès du Conseil Départemental de l'Orne en avril 2023. Deux mois plus tard, le dossier n'a toujours pas été instruit, le professionnel dans la situation relance donc l'instructeur et l'infirmière : le dossier n'avait pas été créé informatiquement, ce qui retarde la mise en place d'aides à domicile.
Les "bons" réflexes : collaborer et assurer un suivi des prises en charge
Beaucoup de services sont les seuls à pouvoir intervenir, ce qui peut vite occasionner un trop plein d'activité, surtout en cette période de crise de ressources humaines, et des actions passent à la trappe. Si la compensation est louable, elle occasionne des frictions relationnelles et des épuisements de professionnels. Il est primordial de rendre lisible ces dysfonctionnements pour travailler des solutions de territoires fiables et durables.
Les points d'amélioration : Plus cette typologie de ruptures sera lisible, tant de manière qualitative que quantitative, plus les autorités de régulation seront sensibilisées et à même de revoir leurs priorités de financements.
Définition : Le droit étant général, il est régulièrement source de disparités quand il ne prévoit pas de distinctions entre des territoires, souvent très différents, même au sein d'un même département. Les parcours de santé ne peuvent pas être travaillés de la même manière selon si on habite à la campagne, en ville, ou à Paris.
Exemple de rupture : Mme S. est peu mobile et ne peut se rendre chez un kinésithérapeute pour sa prise en soins. Le professionnel intervenant à domicile le plus proche ne prend plus de nouveaux patients. Le professionnel suivant en terme de proximité géographique refuse de prendre M. S. comme patiente car l'intégralité des kilomètres ne lui seront pas remboursés, n'étant pas le plus proche.
Les "bons" réflexes : trouver une alternative à la réponse inopérationnelle
En collaborant avec vos partenaires, en consultant les outils mis à disposition par le DAC, ou en nous contactant directement, des alternatives peuvent être trouvées. Ces nouvelles réponses sont à rendre lisible afin de les valoriser, les expérimenter, les généraliser.
Les points d'amélioration : Les autorités des régulations locales ou nationales peuvenr réagir si on leur donne ensemble les élèments nécessaires à la priorisation de nos problèmatiques. Bien que les temporalités de traitements peuvent démoraliser, il ne faut pas s'arrêter d'innover afin de préparer le système de santé de demain.